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The house light Cap Reinga

De Mangonui, au Cape Reinga Nortland Country

Garder le Cap

Pour un marin c’est évident. Garder le cap est une procédure incontournable de la navigation. Elle sera choisie selon de multiples paramètres qui vont lui être dispensés, la plupart de façon instable. Sans être un but, c’est une voie choisie librement, ou pas, en fonction des courants, du vent, des obstacles, des dépressions à venir, de la réglementation, que sais-je encore.

Pour le voyageur vélo, les paramètres sont imposés. Il doit suivre la route proposée, avec des repères bien en place mais au fil du temps, ce choix se restreint. Il devient ultra-sensible à toutes les influences, qu’elles soient physiques, topographiques, matérielles, météorologiques et surtout, mentales. Pour le voyageur vélo, un cap est plus qu’une direction. C’est le but suprême, son Graal. Avoir “envie d’aller voir”, déclenche toutes ses décisions.

Aussi, lorsque j’ai découvert la carte de la Nouvelle Zélande, avec au Nord sa longue péninsule de 100 kilomètres qui sépare du bout de son nez la mer de Tasmanie de l’océan Pacifique, le Cap Reinga fut une évidence incontournable, le but ultime de mon parcours vélo.

Une étape de liaison, le long de la côte Est qui se meurt dans des marais et mangroves saumâtres, pour réduire la distance au profil montagneux est choisie. Le campground de Houhora Heads situé à l’entrée d’une baie maritime où la mer prend des vacances sans faire de vagues, servira de base aller retour pour puiser la force de m’y rendre car 80km de montées par paliers m’attendent.

Face au Cape, on peut toujours se lamenter des heures en évoquant les pentes trop raides, la charge trop lourde, la distance trop longue. Ça ne change pas le problème. Le Cape est toujours là, inamovible. Son roc dressé face aux tempêtes résiste à tous les vents, à toutes les vagues. Le peuple premier Maori, majoritaire dans le Northland, lui a d’ailleurs dédié une place sacrée où l’esprit des morts part pour l’au-delà, «l’Hawaiki», par l’intermédiaire d’un arbre séculaire enraciné sur le rocher. Le Cap Reinga est discret. Il ne s’offre pas de façon impudique à une vue panoramiquement touristique. Il faut venir tout prêt de lui pour qu’il dévoile enfin ses contours de
sable blond mollement étendu sur une végétation au vert criard et ses rochers qui bravent depuis la nuit des temps les déferlantes venues d’Australie.

The house light Cap Reinga
The house light Cap Reinga

 

Une «ligth house» -j’adore ce mot-,ronde, rassurante, transparente, y diffuse ses rayons depuis 1941. Tout est en harmonie en ce lieu sacré. Je m’y rendrai par deux fois pour trouver la bonne lumière photo, en arrivant l’après midi, attendu par des nuées de moustiques et le lendemain matin, après un camping isolé dans une petite crique nichée au bout d’une descente vertigineuse de 2,4km en gravel.

Toujours de belles rencontres

Au campground de Houhora Heads, j’ai rencontré deux jeunes Bretons, Nolwenn et Enzo, immobilisés par un moteur de van explosé, en fait une arnaque. Enzo cuisinier de formation a trouvé du travail au restaurant d e la plage chez Lucile. Il m’avait promis de nous concocter un repas poissons et bien nous avons été servis. Enzo a sublimé, façon japonaise et avec talent, le King Fisch pêché dans l’après midi, associant à des plantes aromatiques choisies dans le potager son goût délicat. Un autre poisson de la baie était pour sa part revêtu d’une panure discrète, délicieux à son tour ainsi habillé. Ce jeune a du talent c’est certain, foi de gastronome en bermuda !

Vers la fin du voyage

Je rejoindrai la ville de Kaitai, puis le petit village d’Hahipara, au bord de la côte Ouest. Son campground, caché dans une végétation tropicale est bercé par la mer de Tasmanie. Je serai séduit et j’y passerai une journée bonus avant d’enchaîner cinq étapes entre mer et fleuves côtiers. Ma rentrée en bus sur Auckland se fera au départ de Wellsford, en raison d’un trafic routier impossible à subir en vélo au risque de finir comme ces pauvres Opossums massacrés en grand nombre sur la route, malgré les boîtes de protections installées.

Mais c’est une autre histoire…