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Le Taranaki vu de 100km à Whagamanui au bord du pacifique

Un monde perdu

Taumarunui est une petite ville allongée le long de sa rue principale. Elle sent bon Le Far-West et respire l’aventure avec ses passages couverts qui relient les boutiques les unes aux autres. Il ne manque au décor que le cliquetis des éperons sur les planches… C’est ici que prend naissance la « Forgotten world highway ».

Ce pourrait être le titre d’un film. Pour moi c’est une route comme je les aime. Elle se faufile entre les Dômes volcaniques, se languit le long de petites rivières où se révolte en se cabrant soudain à 13 % pour franchir un « Saddle » que l’on peut traduire par crête. La Nouvelle-Zélande me donne ce qu’elle a de plus beau, une campagne paisible, tout de vert vêtue où même les fermes (stations) semblent hors du temps. Quelques troupeaux de vaches aux nombreuses têtes de race Angus (Black comme il se doit!) déambulent tranquillement dans les pâturages. C’est le temps où les moutons sont rassemblés par milliers dans des parcs en attendant la tonte. Les forêts sont denses, pourvues d’une végétation tropicale et la tête couronnée des fougères arborescentes émergent fièrement de cet océan de verdure.

Passé le Paparata Saddle, je rentre dans les gorges de Tongarakau, espace de fraîcheur qui me régénère après la dernière de mes 8
ascensions. Mais dans « le monde perdu » les cantonniers s’en sont allés, laissant derrière eux 10km de gravillons généreusement épandus. Ce n’est plus du vélo, mais juste un exercice de cirque à 3 Km/h.! Ainsi vont les surprises…

Voyage dans le temps

Ces voyages franchissent l’espace temps. Dans ce siècle naissant, le 20ème, les
hommes ont eu envie de s’évader de leur quotidien, de conquérir de nouveaux territoires, mais aussi de ne plus accepter de fatalité
mortelle en raison de l’éloignement des médecins et du temps de transport nécessaire aux interventions. La nouvelle civilisation
annonçait l’automobile, il fallait réaliser de vraies routes pour leur permettre de rouler hors des ornières de boue où chevaux et hommes s’épuisaient. Si l’on se replonge un instant sur ce que fût la vie de ces pionniers des années 1890 à 1910 lors de la création du “trail” nouveau, on peut imaginer le travail de forçat, tout à la pelle et à la pioche dans des conditions climatiques extrêmes que vécurent ces malheureux. La route leur rend hommage et notamment à celui qui conduisit cette folle entreprise, Joanas Morgan, lui même mort en mars 1893 d’une péritonite à 35 ans sur le chantier…faute de médecin!

Le tunnel de Moki, laissé dans son état originel, m’ouvre la dernière porte sur la
descente vers Whangamomona. Le campground et les quelques habitations regroupées autour de l’hôtel historique, fondé à la fin du 19eme siècle, me semblent presque être le havre de repos idéalement rêvé.

Le Pacifique enfin…

Renseignements pris la route que j’avais choisie pour repartir sur Plymouth est en fait
en Gravel. Vu l’exercice précédent je renonce à cette entreprise et fonce directement sur Stratford. Épuisé par ces derniers 50km d’un parcours vallonné, je décide de prendre un bus pour me rendre à Plymouth distant de 30km, (je les parcourrai au retour) où je m’octroie une journée de repos dont j’ai sensiblement besoin. Le ressac des vagues mourantes sur la plage de sable noir de Plymouth bercent ma nuit.

On approche de Noël avec un jour d’avance pour moi, Santa Claus me précède, mais c’est une autre histoire..